La fameuse « ballot box question »

On m’a souvent reproché d’ignorer la question nationale, de vouloir éloigner les débats de l’axe souverainiste-fédéraliste. J’ai dû être qualifiée, avec le temps, d’à peu près tous les synonymes d’anti-patriote. Remarquez qu’il est facile d’être anti-patriote au Québec… Il suffit d’être obsédé par les finances publiques, d’être fédéraliste, ou de tout simplement se préoccuper davantage des services à la population que d’indépendance du Québec.

Dans le temps (2003), j’étais devenue membre de l’ADQ justement parce que le parti avait décrété un moratoire sur ce débat qui à mon avis, étouffait le Québec et retardait la résolution des problèmes structurels qui empoisonnent notre fiscalité, nos entreprises, nos système de santé, d’éducation et tout le reste.

Pas cette fois-ci.

Depuis dix-huit mois maintenant, la trame narrative est nettement celle qui tend à préparer les Québécois à une nouvelle ronde référendaire. Et vous savez quoi? Si j’avais à mesurer ses chances de succès, elles seraient élevées. Pour toutes sortes de raisons.

D’abord, le PQ, aidé de ses alliés, a bien préparé le terrain. Le Québec « emo » est à fleur de peau avec le débat sur la charte qui a monopolisé toute l’attention cette dernière année. En recrutant les Drainville, Lisée, Duchesne et maintenant PKP, on a une idée qu’ils sont sérieux. La montée de Julie Snyder sur une scène péquiste lors de la dernière campagne électorale envoyait un signal on ne peut plus clair. Était-ce le début ou la confirmation d’une alliance entre un pouvoir politique et un pouvoir médiatico-culturel?

ET LA CAQ DANS TOUT ÇA?

On peut être torturé du fait que la CAQ soit menacée. Elle qui a véritablement fait ses devoirs, contrairement au PLQ trop occupé à se donner un nouveau chef. Elle qui a su nous éviter le pire durant le mandat du Parti québécois et qui a été celle qui a été le vrai parti d’opposition. La CAQ a su ralentir les ardeurs du PQ dans son radicalisme linguistique (projet de loi 14). En matière de charte, elle a proposé une solution qui aurait certainement rallié la majorité des Québécois si cela n’avait été de la démagogie du PQ et de l’indécence avec laquelle on a « surfé » sur les insécurités identitaires des gens des régions et avec laquelle on a profité de l’athégrisme de certains autres.

La CAQ a su faire accoucher le Parlement d’une loi sur les mines. Après le gâchis du Parti québécois, on a finalement convenu de quelque chose de potable. Et finalement, le député Christian Dubé a vraiment travaillé fort pour étayer un plan de redressement des finances publiques qui n’avait pas peur de jouer sur la colonne des dépenses (contrairement au PLQ).

Malgré tout cela, la survie d’un troisième parti à l’Assemblée nationale est en jeu à cette élection-ci. Nous voilà revenus de façon fulgurante sur la question qui trouble encore 40% des Québécois, soit ceux qui croient encore possible que le Québec doive se séparer du Canada.

LA QUESTION DE L’URNE

Et cette fois-ci, la menace, ou l’espoir, sont bien réels. La machine est en marche et on jouera, du côté du PQ, le tout pour le tout.

Comment voteront les Québécois le 7 avril prochain? Quelle sera la « ballot box question »? Pauline Marois réussira-t-elle à faire croire que cette élection-ci n’est qu’une campagne électorale pour un « bon gouvernement »? Trop tard, s’exclament plusieurs analystes.

La CAQ réussira-t-elle à sauvegarder ses comtés? Personnellement, je souhaite qu’elle puisse préserver ceux pour lesquels le PLQ n’a aucune chance de percer. Ce sera toujours ça en moins pour le PQ. Mais continuera-t-elle de souffrir de la polarisation du vote due en grande partie à l’arrivée de PKP qui, poing en l’air, déclarait qu’il allait en politique pour le pays?

Mais la CAQ souffrira-t-elle au contraire, d’avoir ignoré la fille qui voulait danser avec elle mais à qui elle fait maintenant des yeux doux, parce qu’en fin de soirée, il n’y en a pas de plus belles? Le centre-droit économique (terme tabou à la CAQ) lui fera-t-elle confiance à un moment où il juge qu’il n’y a rien de pire pour le Québec qu’un Parti québécois majoritaire en cabale pour un 3e référendum? Parce que cette fois-ci, cette droite économique jugera que la menace est réelle?

Philippe Couillard réussira-t-il à charmer les Québécois et à faire oublier la haine que nombreux d’entre eux ressentent pour le parti qui a tant retardé à créer une Commission d’enquête sur l’industrie de la construction en plus d’avoir été parfaitement insouciant de l’obésité morbide de l’État, de la dette et de l’étouffement fiscal des Québécois et des entreprises?

LES DÉBATS ET FACE À FACE DES CHEFS

Jeudi 20 mars, il y aura un débat des chefs sur les ondes de Radio-Canada et Télé-Québec. Écoutez pour voir… Le jeudi suivant, le 27 mars TVA diffusera une série de face à face entre les candidats. Étant donné l’importance de cette élection, je vous suggère fortement d’être à l’écoute.

Je vous laisse enfin, sur un extrait de chronique de Vincent Marissal, ce matin. J’ai trouvé ce passage particulièrement savoureux. Et je vous laisse deviner de qui il s’agit.

Le fait est que les souverainistes ont longtemps cherché la formule, les fameuses « conditions gagnantes », selon l’expression de Lucien Bouchard. Avec des slogans accrocheurs, en attendant le grand jour, comme « À la prochaine fois » de René Lévesque ou les « 1000 jours » de Bernard Landry.

Pauline Marois n’est pas tombée dans le lyrisme, mais elle et son entourage ont clairement concocté un plan. À défaut d’obtenir un jour les « conditions gagnantes », le PQ croit avoir réuni « la combinaison gagnante » avec l’arrivée de PKP. Tout cela n’est ni improvisé ni fortuit. Ça se préparait depuis un bon moment. L’été dernier, me suis-je laissé dire, PKP recevait déjà chez lui la chef du PQ, un historien-auteur très actif dans le mouvement souverainiste et au moins un chroniqueur du Journal de Montréal. – Vincent Marissal, La Presse, La combinaison gagnante.

P.S. « Ballot box question »: L’enjeu qui fait foi de tout, une fois dans l’urne et sur lequel les gens finissent par voter.

7 réflexions sur “La fameuse « ballot box question »

  1. Après les élections retour a la réalité….déficits, coupures, etc…Il faut d’abord avoir un gouvernement majoritaire et rien n’est fait.

    Je consulte régulièrement le site tooclosetocall, en général assez juste, et pour le moment le PQ est en terrain minoritaire, et avec moins de voix que le PLQ. Pauline restera t-elle au volant dans ce cas ?

    Avec le dernier sondage, PLQ a 37 %, ce parti est-il sous-estimé de 3 a 4 % comme en 2012…si oui, avec une baisse plus que tendancielle de la CAQ, rien n’est écrit…

    On peut influencer l’opinion, faire de l’identitaire, etc, les transfert de la CAQ vers le PLQ ne sont pas positifs pour le PQ, il y a des tendances lourdes actuellement (démographie, l’économie qui n’ira pas mieux en 2014-2015). PKP actuellement est plus un handicap qu’autre chose, il peut aider s’il est ministre, comme vedette économique, est-ce suffisant…? Loin d’être sur…

    Descoteaux dans Le Devoir qui ose parler de gouvernement PLQ minoritaire voire majoritaire, j’ai du me pincer pour y croire.

  2. Plusieurs devraient donner un certain crédit à mon radotage.. J’avais en plus parler du Ministre Français Hérault en visite à Québec l’été dernier qui avait été invité chez Pauline en même temps que PKP.

    Et la CAQ maintenant? Vous aurez beau énumérer leurs bons coups, cela n’a en rien empêcher un ralentissement des investissements au Québec plus marqués que ce n’était le cas sous le PLQ.

    Vous oubliez que Legault a tué l’ADQ.. Pourquoi? C’aurait été tellement plus simple de poursuivre dans l’ADQ, ce parti clairement identifié à la droite. Qui plus est, les ex-adéquistes ont été casés sur les banquettes arrières.

    Voilà que maintenant les carottes sont cuites pour Legault, il se rabat sur le programme de l’ADQ. Quel courage en effet!

    Non, il sait très bien que les votes caquistes qui restent en sont de fédéralistes. Le PQ a fait le plein. Il ne bouge plus depuis janvier dernier.

    C’est quoi l’intérêt de ce regain soudain d’énergie? Aider Pauline et le PQ peut-être? Diviser les votes fédéralistes, c’est tout ce qui résultera si certains adéquistes se laissent convaincre par le manipulateur Legault.

    Les ex adéquistes doivent quitter la CAQ et devenir indépendants.. Sinon, l’Assemblée Nationale devra se passer de leurs contributions.

    Il faut voter stratégique.. N’écoutez pas le chant des sirènes de Legault.. Un attrape-nigauds de plus….

  3. Vous êtes tannées d’entendre parler de souveraineté et vous voulez que le gouvernement fasse des économies, et bien soyez courageux et exigez la dissolution complète du gouvernement provincial du Québec et remettez les pouvoirs complet à Ottawa. Ainsi, on entendra plus parler de souveraineté et on économisera tout un palier de gouvernement, soit des milliards de dollars chaque année. Sinon, tout ce que vous voulez, c’est le meilleur des deux mondes, soit un semblant de souveraineté en ayant un gouvernement provincial n’ayant pas tous les pouvoir et un bon coup de pouce financier de la part du gouvernement fédéral, et ça mais amis, c’est l’attitude des enfants rois. Qu’on se décide.

  4. Malgré l’utilité de la CAQ dans l’opposition et un programme lucide, ce parti ne réussit pas attirer suffisamment la passion et la raison des électeurs pour se matérialiser en terme de votes. En conséquence, un vote fédéraliste stratégique et réfléchi devrait se diriger vers le PLQ malgré les failles du régime Charest. L’avenir du Canada est trop important pour diviser le vote fédéraliste et risquer ainsi un gouvernement péquiste.

  5. J’ai déjà voté PQ quand le Québec était une province Canadienne riche. Je me disais alors que le Québec faisait vivre les éleveurs de porcs de l’Alberta. Aujourd’hui, le Québec (Québécois et Québécoises) sont endettés et reçoivent plus de $ 9G de plus qu’ils ont donné du Gouvernement Fédéral; ce sont les autres Canadiens qui doivent se dire qu’ils paient pour des services qu’eux ne se paient même pas. Si le Québec était une Compagnie, ça ferait longtemps que les financiers, incluant les autres provinces Canadiennes auraient fermé la valve. J’espère que les Québécois vont s’ouvrir les yeux. J’aime le programme de la CAQ autant ou même plus que celui du PLQ mais à ce stade, elle divise le vote fédéraliste et contribue à donner la chance au PQ de former encore une fois le Gouvernement. De plus, Legault est et sera toujours un souverainiste.

  6. J’ai peur, très peur! Par contre, PKP n’est pas ce que Marois pensait. Je le remercie pour nous avoir encore plus averti des plans boa constricteurs de Marois. Sainte Marie Mère de Dieu délivrez nous du PQ. comme vous l’avez fait avec Jack Layton pour le Bloc. SVP trois fois et un chapelet et encore meiux un rosaire.

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