Garderies : Couillard a tort

Couillard a tort d’évoquer l’idée de tarifer les CPE en fonction des revenus. Pas parce que l’idée n’est pas bonne, pas parce que cela va à l’encontre du sacro-saint principe d’universalité (c’est faux!), pas parce que les gains pour l’État seront insignifiants. Pas non plus parce qu’on finirait par faire payer davantage une classe moyenne, faute de « vrais riches ».

Couillard a tort de parler de tarifer les CPE en fonction du revenu des parents parce que ce n’est pas le temps d’en parler et que son opinion n’est pas pertinente à ce moment-ci. S’il veut nuire à ceux qui réfléchiront aux réformes, il n’aurait pas pu mieux trouver.

Le gouvernement libéral déposera le 4 juin prochain un premier budget. Ce budget ne règlera rien, on le sait. Ce qui donne espoir pour le moyen et le long terme, ce sont les deux exercices de révision systématique des programmes et de révision de la fiscalité.

« L’heure n’est plus aux changements cosmétiques », selon le PM lui-même. Il a dit ça en campagne électorale; il l’a répété lors du discours inaugural de la présente session parlementaire.

Ajuster le tarif quotidien des garderies selon le revenu est certes, une mesure plus progressive, mais c’est une mesure cosmétique!

À ce compte-là, si le gouvernement avait besoin d’un « fix » (solution temporaire) le gouvernement libéral aurait dû piler sur son orgueil et reconduire la mesure d’augmenter pour tous le tarif à 9$ – ce qui passait le test de « l’acceptabilité sociale » à court terme et qui aurait tout de même envoyé un signal que tous doivent mettre l’épaule à la roue.

S’il veut discréditer les travaux de ses deux commissions, voilà la façon de le faire: émettre ses préférences idéologiques, lancer des ballons, et court-circuiter un effort d’analyse rigoureuse et un exercice pédagogique qui est crucialement nécessaire. Pas bon. Pas bon du tout.

AU-DELÀ DES MESURES COSMÉTIQUES

Si le programme des garderies nationalisées était soumis au test de l’efficacité, il ne le passerait pas. Non seulement la courbe des naissances y est complètement indifférente, il est douteux que le taux de natalité justifie un tel programme aussi coûteux.  Conçu pour soutenir les familles dans le pétrin, les études démontrent par ailleurs que les enfants de familles défavorisées n’y sont pas. La révision des programmes ne doit-elle pas réactualiser tout ça? Alors faisons-le! Ne mettons pas la charrue avant les boeufs.

Un autre programme à revoir est celui de l’assurance parentale, un programme qui alourdit le fardeau fiscal des citoyens et des entreprises de 2 milliards par année, mais néanmoins déficitaire de 350 millions $ cette année, selon le Journal.

Nos programmes sociaux n’ont pas à être les plus coûteux et les plus généreux, nous disait le premier ministre lui-même. Soit. Le régime d’assurance parentale l’est!

Le plafond de revenu assurable est le plus élevé et le taux de remplacement de revenu est le plus élevé que ce qu’on observe ailleurs au Canada. Grosse charge fiscale qui s’ajoute aux taxes sur la masse salariale des entreprises, selon la FCEI. Vous êtes sincère quand vous dites régler le déficit structurel? Vous êtes sincère quand vous annoncez qu’il faut revoir les fondements du régime fiscal? Voilà une belle occasion.

Finalement, il y a le programme de soutien aux enfants de la RRQ qui est, encore une fois, plus généreux et plus coûteux qu’ailleurs.

En 2008, la Chaire de recherche sur les finances publiques et la fiscalité de l’Université Sherbrooke avait conclu que le Québec était le paradis des familles, « que les jeunes familles du Québec disposent de plus d’argent pour élever leurs enfants qu’en Ontario, en Alberta, aux États-Unis ou en France. Même la Suède, pourtant réputée pour ses mesures sociales, n’est pas plus avantageuse. » – Source

Est-il tabou de réexaminer tout ça? Je serais curieuse. Si on prenait tous ces programmes et qu’on en faisait la somme, cela représenterait combien comme charge fiscale? Quels étaient les objectifs, au juste, de tous ces programmes? Sont-ils encore justifiés? Avons-nous des taux de natalité qui justifient ce « paradis des familles »?

L’heure n’est plus aux changements cosmétiques, nous dit le premier ministre. Il lui suffit maintenant d’appliquer sa propre médecine et de solliciter un bon médecin de famille plutôt qu’un chirurgien esthétique qui ne jouera que sur l’image sans pour autant redonner une confiance intérieure à son patient.

Un graphique pris à partir du site d’Antagoniste et qui mériterait d’être mis à jour par le gouvernement et qui parle beaucoup.

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12 réflexions sur “Garderies : Couillard a tort

  1. vraiment les gens sont des ignoramus économique – surtout les fiscalistes de l’université de Sherbrooke… en fait tous les économistes nourris au petit lait de Keynes et ces inepties… alors… le programme de garderie coûte moins cher aux familles???? c’est de la redistribution du peu de cash produit dans cette povre province (+ emprunts donc c’est pas le petit jésus ici qui va payer mais bien les contribuables – allo) ici – donc on vole pierre pour donner à paul – ce n’est pas le secteur privé qui a inventé une nouvelle façon de garder les enfants ou qui sont plus productifs pour le faire mais bien de la redistribution du même $ donc c’est une illusion que ça coûte pas cher aux familles.. évidemment pour le deadbeat qui se tient toujours sur la ligne et qui paie pas beaucoup d’impot et qui fait des flots et les envois à la garderie à 6 mois – il est mort de rire.. mais pour que lui rit il faut que d’autres se fassent plumer … et la dernière fois que j’ai vérifié on était dans le trou alors ce concept que ça coûte pas cher … ah les économistes payés pas l’état… faut pas trop brasser la cabane n’est-ce pas? 25% de baisse des impots des entreprises début 2014 … et vous gossez sur la tarification des garderies… good grief!!

  2. Jadis, il y avait les Allocations Familiales.
    Les parents recevaient ces allocations de l’État, imposables, et pouvaient décider d’en faire ce qu’ils voulaient, c’est-à-dire que soit la mère restait à la maison pour mieux veiller sur ses enfants, soit les parents en mettaient une partie de côté pour l’éducation future des enfants, etc.
    Etant imposables, le montant réel net dépendait du revenu des parents et ceux qui devaient payer une gardienne en payaient le plein prix ou utilisaient un parent proche.
    Aujourd’hui, on vous a enlevé le droit de décider par vous-mêmes et c’est l’État qui décide (et vous facture le gros prix) à votre place.
    Pourquoi faire simple dans l’État Québécois quand on peut faire compliqué?

  3. J’abonde dans votre sens.

    Accepter d’appliquer immédiatement l’augmentation prévue par les péquistes et déjà presque endossée par une grande portion de la population du Québec serait un bon début. Comme le disait Jean Chrétien, quand on se peinture dans le coin, il faut parfois marcher sur la peinture d’autant plus que personne n’en tiendra rigueur à Philippe Couillard.

    Bien sûr, les péquistes en feront leurs gorges chaudes mais qui s’en souviendra dans 4 ans?

    Le graphique est très révélateur et confirme mes doutes. La plupart des autres provinces qui vivent dans le même Canada que nous ont un taux de natalité supérieur au nôtre SANS CPE à $7.00 et SANS les plus généraux congés parentaux au monde. En fait, il semble que nos programmes n’aient eu à peu près aucun impact sur le taux des naissances.

  4. Et pourquoi l’électricité, les transports en commun, les permis de conduire, les immatriculations, les produits de la SAQ, whatever, ne seraient-ils pas fixés en fonction des revenus, comme les loyers de certaines coopératives d’habitation? Ce serait marrant de voir tous les clients (ou bénéficiaires? comment devra-t-on les appeler?) arriver à la caisse, avis de cotisation en main, et essayer d’obtenir le plus bas tarif possible. J’imagine déjà les belles et longues queues (disons «files», c’est moins suggestif) de bougons, sourires narquois en coin, heureux de fourrer le système qui profite sur le dos des vrais contribuables.

    Tant qu’à faire, pourquoi s’arrêter en chemin et ne pas forcer les municipalités et les commissions scolaires à nous taxer en fonction de nos revenus? Et le secteur privé, pourquoi échapperait-il à cette logique? N’est-il pas honteux que le prix des bananes, de la bière et des repas au restaurant soit le même pour tous?

    La confusion des genres, ou des ordres selon Pascal, est toujours source de solutions monstrueuses. Il y a d’autres moyens pour un État d’aider les plus nécessiteux que d’instituer des classes de clients à l’image des classes de contribuables constituées aux fins de l’impôt sur le revenu. Nous n’avons pas le choix de «contribuer» mais nous aimerions aussi qu’on ne voie pas en nous que d’inépuisables payeurs de taxes.

    • Très bon commentaire. Vous avez démontré par l’absurde le problème de la tarification selon les revenus. J’avoue que j’y était favorable jadis. Je ne le suis plus maintenant. La « redistribution » doit se faire autrement qu’en réglementant et en discriminant sur les prix des services.

  5. Exactement ce que je craignais est en train de se produire. Les belles paroles du PLQ sur la saine gestion des finances publiques étaient des paroles en l’air. Couillard n’avait qu’à reconduire la hausse déjà prévue par le PQ, mais il veut se faire du capital politique sur le dos des « riches ». Combien on donne de chance au coureur Madame Marcotte ? Où sont les Coiteux et Leitao pour remettre le PM à l’ordre ?

    • personne dans ce gouvernement est philosophiquement convaincu que l’état doit se tasser de là et laisser le libre marché faire la job – donc ce sera de 2 choses l’une – une lente descente dans la stagnation économique où le petit peuple se contente de miettes car conditionné à se faire )&(*&(*&(* ou un réveil brutal car on t’a coupé la carte de crédit. Par définition les politiciens ne coupent pas, ils réarrangent les chaises sur le Titanic. Eh oui les libéraux vont parler mais il se passera pas grand chose – si je voulais attaquer un village – il me semble que je leur enverrais pas mon plan d’attaque avant – là c’est exactement ce que Couillard fait au lieu de dire – j’ai la majorité – c’est le début du mandat – voici la chainsaw. Mais non on aura pas cette chance.

  6. Dans toute cette saga des coûts de garderie modulés en fonction du salaire, ce qui me fait le plus suer c’est que c’est déjà les plus nantis qui le finance a même leurs impôts. Et nous qui sommes à l’aube de la retraite, hé bien on paie pour ces garderies, et ce, même si nous n’avons plus d’enfants à la maison. Quand je travaillais, je payais le prix demandé par la gardienne. La responsabilité des enfants n’appartient pas à la société, elle appartient aux parents.

  7. On oublie que la tarification en fonction des revenus c’est de la double taxation. Cette double « progressivité » résulte en des distortions importante rendant notre régime fiscal beaucoup moins progressif.

    Il s’agit de consulter l’étude annuelle de Lafrenière et Montreuil…

    Cliquer pour accéder à texte_explicatif_2013.pdf

    Pour ceux qui l’ignorent par définition un système d’imposition progressif propose des taux d’imposition marginaux croissant. Il y a belle lurette que le système fiscal canadien ne réponds plus à cette définition.

    Le pire c’est que ceux qui ont les taux les moins progressif sont ceux que l’on voudrait généralement aider. Famille avec enfant (monoparentale ou non).

    Le vrai problème avec cette nouvelle tarification modulée, c’est que certains taux marginaux effectifs dépasseront allègrement le 100%… Je ne peux pas croire que Laetao et Coiteux n’aient pas soulevé cette problématique en caucus.

    Bravo M.Couillard…

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